lundi 18 mars 2013

Alfred VAN CLEEF, une lettre de l'au delà, de Jacques Walewyk Lacloche

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Un abonné de ce blog, qui dans un premier temps avait acheté cette enveloppe pour son timbre de 1937,dans une foire à tout. Il concluait par :

"j'espère que vous y trouverez de quoi avancer dans cette histoire."

Il ajoutait :
"Un an avant sa mort, Alfred recevait une lettre du père de Jacques (Jules dit Julien, son beau frère?) avec courrier à en tête Comptoir Belge de Textiles 67 chaussée de Charleroi BRUXELLES. Apparaissent les termes toiles, trousseaux, batistes, linge de table, déshabilles. Point de diamantaire, négociant, lapidaire ,Il y est fait mention de Kiki, Nénette "


A l'intérieur il y avait une lettre et ce charmant monsieur me l'avait scanné, une seule page, je m'empressais de lui demander le coté manquant, mais par discrétion pour des gens qu'il connaît, il ne désira pas le faire.


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Je me mis dans un premier temps à essayer de déchiffrer le texte, première surprise, cette personne qui semble bien le connaître, lui écrit en employant le diminutif Fred. J'ai essayé plusieurs fois et je crois être arrivé à un texte très proche de celui écrit, il me manque un mot.

Il serait très intéressant de savoir comment cette lettre est arrivée dans une foire à tout.


Mon Cher Fred
Je te remercie très sincèrement ainsi que Rachel pour la...que tu nous as témoigné par tes condoléances.
Ci joint Mon Cher Fred, tu trouveras un chèque à ton ordre de 5000frs, à titre de premier amortissement ne voulant pas retarder davantage. Tu voudras bien me dire combien de £ cela fait puisque tu as réduit ma dette envers toi à 260£ (NDLR env. 5200frs) Normalement mon cher Fred, j'aurais dû t'envoyer davantage vu le change, mais je ne te cacherais pas que cela m'est impossible en ce moment. En effet nous n'avons pas amorti notre affaire, ici et surtout grâce.


Un lecteur Mr François  de-la-Cloche a analysé le texte en vérifiant les similitudes dans les caractères et m'a écrit que le mot manquant (après Rachel pour la) était "Sympathie"


Ainsi Alfred Van Cleef a prêté de l'argent à cette maison , mais quelle personne se cache derrière  ce nom de famille? J'ai écrit à la Ville  de Bruxelles qui a transmis à son service des archives, lequel m'a indiqué l' endroit ou trouver de vieux annuaires numérisés.

D'abord je cherchais ce Comptoir Belge de Textiles à son adresse en 1937 et je trouvais




Le comptoir Belge des Textiles est bien là, mais qui le dirige?



Comme il semblait d'après la lettre de 1937, qu'Alfred avait aidé cette personne à s'installer, je vérifiais en 1936  au 67 de la Chaussée de Charleroi se trouvait une maison de couture : Renkin et Dineur:




Il me fallait donc trouver l'annuaire des "personnes" et je découvris le nom du propriétaire de la société Comptoir Belge de Textiles,  les  Walewyk Lacloche.

Lacloche? le rapport avec Alfred Van Cleef ? La Maison Lacloche de la rue de la paix?

Pas si simple et dans l'état actuel de mes connaissances , je ne puis établir de parallèles entre tous les Lacloche.

Je reprenais la lettre mais ne trouvais rien qui puisse m'aider, juste le temps d'apprendre ce que sont les Batistes, une fine toile de lin très appréciée depuis des siècles, les ouvriers de la région appelaient cette toile le linon ou encore la toilette , les Batistes firent la fortune des ateliers du nord jusqu'à la fin du XIX ème siècle, mais l'arrivée du coton et de la mécanisation firent disparaître après la guerre de 1914 cette spécialité.

Pour le Lacloche,Joaillier de la rue de la paix, j'avais découvert que pendant la grande crise des années 30, la faillite du comptoir Lyon Alemand, avait créé un véritable Crash pour les diamantaires et les joailliers qui étaient tous créanciers du CLA (Le comptoir survécut, mais pas les joailliers et les diamantaires) Ainsi Lacloche avait fait partie du lot, j'avais traité ce crash dans :


J'ai découvert qu'il y avait un "Walewyk Lacloche" qui fut un grand joaillier de Madrid , mais peu d'objets ont survécu, une vente de Maître Calmels!

MONTRE-PENDENTIF de forme ovale 
à l'imitation d'un flacon de parfum. Elle est ornée sur les deux faces d'émaux noirs et blancs représentant une vestale et des feuillages. Deux anses en forme de grecques. 
Monture en or et platine à frises de feuilles de laurier et bélière en nœud de ruban entièrement serties de diamants taillés en rose et d'une émeraude. Tour de cou en platine (petits chocs). 
Années 1910.
Dans un écrin de la Maison Walewyk-Lacloche. Madrid. 
30 000 / 40 000


Par ce même canal, j'appris aussi qu'il y avait eu une vente en 2006 par maître Cornette de Saint Cyr!

Walewyk LACLOCHE Bruxelles, circa 1958
Robe de cocktail en dentelle rouge, décolleté coeur, sans manches, jupe ample froncée à partir des petites hanches sur jupons de tulle en dégradé
Griffe beige, graphisme rouge

Je cherchais à nouveau, le Comptoir Belge de Textiles avait survécu aux Nazis, après la guerre il s'était déplacé sur la prestigieuse Avenue Louise


 et puis..et puis... la dernière trace en 1966


Vu la complexité de ces familles je fis appel à Gaby Laws dont les travaux de généalogie sont reconnus. Sur Genpals : http://genpals.co.uk
Réponse de Gaby:
Je pense que c'est comme ça:Jacob / Jacques Walewyk était marié à Bertha Lacloche, ils ont un fils Arthur Walewyk qui a épousé Rachel Walewyk.
Arthur et Rachel a eu un fils Jacques, né vers 1909 à Madrid, il était bijoutier et en 1941, il rendit visite à son ami H. Winston, 620 5th Avenue, New York (Harry Winston de la bijouterie).Mais aussi la  famille Walewyk se connecte à Schoonhoed et Marcus (ma famille aussi) et ils avaient des entreprises en tissus et  couture, etc :signé Gaby

Je me suis souvenu qu'une relation amicale, Stéphane, un généalogiste qui m'a tiré une fois d'affaire dans l énorme erreur de la généalogie officielle d'Alfred Van Cleef, (jamais rectifiée par les Arpels) m'avait dit que ce dernier avait été baigné dans une famille et un entourage de Joailliers qui avaient certainement décidé le Jeune orphelin, puisque Salomon Van Cleef était décédé à Nice alors que son fils avait 11 ans.
Il apparaît plus que probable que son oncle Salomon Arpels le prit en charge, à la fois financièrement certainement aussi en aidant sa belle soeur, veuve de Salomon Van Cleef, au point de lui faire une telle confiance qu'il s'associa avec lui et lui confia sa fille Esther.
Stéphane me répondit comme à chaque fois que je l'ai sollicité.




Tombe de Rosalie Lévie et Henri Lacloche


D'après ce que je sais les Lacloche sont liés aux Arpels et donc être lié aux Arpels revient à être lié aux Van Cleef. Jacques Arpels fils de  Jules Arpels et Léa Grumberg (Jules étant le fils de Léon Salomon et le frére d'Esther) était marié à Lucie Hessel (fille de Joseph Hessel et Lucie Reiss).Le grand père(paternel) de Lucie, Herman Hessel, était marié à Rosalie Bernheim "Galerie Berheim" ,c'est la même famille,je pense que vous connaissez!) .La soeur d' Herman Hessel,Jeannette, était l'épouse de Zaudy Verger,lequel était le fils de Michel Verger(Samuel) et Hélène Wesly.La mère de Michel Verger,Sophie Verger a épousé en deuxième noce Hector Lacloche(son premier mari, Samuel Isaac est décédé en 1804,il était le père de Michel Verger).Hector Lacloche et Sophie Verger était ,semble t-il,les parents de Julie Simons/Verger/Lacloche.Cette dernière a été mariée avec Jacques Jean Simons avec lequel elle a eu au moins quatre enfants(des filles).Mais elle a eu en 1828 un enfant naturel, Henri(Hendrik) Lacloche ,le père des frères Lacloche.
Voila ce que je peux vous dire.Comme vous le voyez tout cela est très complexe(et sans certitude absolue!).Ceci étant dit je pense que toutes ces familles(et vous n'avez là qu'une petite partie de l'Iceberg!) se connaissaient ,se sont croisées ,se sont fréquentées à un moment ou un autre .


Merveilleuse réponse, mais qui me rend encore plus perplexe.

Pour la bijouterie Lacloche de Paris


Vente Christie's

 La Maison Lacloche Frères était un commerce de détail mais qui avait, comme tous les grands de cette époque, choisi les meilleurs artisans pour ses fabrications,  Louis Girard, Georges Verger, Rubel, Georges Lenfant, M. Strauss-Allard-Meyer et Halluin-Matlinger. Les frères Lacloche puisent leur inspiration dans l'art oriental et chinois, ainsi que les fables de La Fontaine. Ils acquièrent une très grande réputation avec, et après l’exposition internationale de 1925.

Lacloche Paris en 1925


Lacloche Paris 1930, Art déco, Onyx Jade (vente Christie's)

Les frères Lacloche: Léopold, Jules, Fernand, s'installent à Paris et Madrid  puis créent Lacloche Frères au 15 rue de la Paix en 1901. L'entreprise a continué à se développer, en 1912, elle ouvre une boutique sur New Bond Street à Londres. Pendant la Première Guerre mondiale, Lacloche a  repris Fabergé à Londres lorsque le gouvernement russe a rapatrié le personnel et les biens de Fabergé. Au début des années 1920, la société, à l'instar de Cartier et Van Cleef & Arpels, était connu  pour ses créations de  vanity case  bijoux et étuis à cigarettes, étuis à rouge à lèvres, poudriers et autres Le krach de 1929 contraint l'entreprise à fermer ses succursales et de ne garder qu’un magasin en  rez de chaussée à Paris.

Somptueux bracelet de Lacloche Paris

 Pendant les années 1930, l'entreprise a vendu principalement des bracelets, broches, clips réglables avec des motifs à l'esthétique moderniste. 
En 1936, Jacques Lacloche a ouvert un magasin de bijoux  au  8 place Vendôme  sous le  nom de SARL Jacques Lacloche. Le magasin est resté ouvert avec Jacques Lacloche, neveu des frères Lacloche, jusqu'en 1966 puis il a arrêté pour faire carrière  dans l'art contemporain.




Duchesse de Westminster avec un diadème offert pour
son anniversaire. Réalisé par Lacloche Paris en 1930, revendu
en 1959 et acheté par Harry Winston, dont on verra qu'il était
lié aux Lacloche


Un "Coven Lacloche" s'installa a Buenos-Aires et notre amie généalogiste Gaby Laws serait ravie si l'un d'entre vous (lecteurs) pouvait lui apporter des renseignements sur toute cette famille de Joailliers



Très beau bracelet avec Poire Saphir et Poire Diamant
de Mr Coven Lacloche dans les années 20


Souvenez vous du dossier des "Shabracq", 
Nous avions découvert la grande complexité de ces familles de joailliers dont plusieurs branches familiales s'installent de par le monde, les Van Cleef qui nous venaient d'Allemagne avaient eux aussi créé un vaste réseau familial et relationnel.
Il est difficile d'étudier les Arpels, ils entretiennent un grand mystère, il y a une histoire officielle, mais sans preuves attestées. Salomon Arpels fils de Salomon Pinas a épousé une fille Mayer, il est rentré dans cette famille et a travaillé comme Salomon Van Cleef d'ailleurs, dans l affaire Mayer. Au contraire de Vincent Meylan, je dois chercher sans l'aide de la famille (sauf 1) qui ne tient pas à communiquer avec moi, ce qui rend suspecte leur version. Vincent Meylan à reçu leurs dires et a peu vérifié, bien qu'il m'ait lu car certaines choses n'étaient connues que de moi.


je crois, mais ce n'est pas une certitude aujourd'hui, que les Arpels se sont lancés dans la Joaillerie parce que les  familles Van Cleef, Arpels, à fortiori   avaient des cousinages  dans la taille du diamant. ( de nombreux actes notariés existent sur les sites des familles juives hollandaises ou les deux familles sont répertoriées)   Mais actuellement il est clair que les Arpels n'etaient pas descendants de lapidaires. 

Salomon Arpels a aidé son neveu Alfred Van Cleef en 1895/1896 mais il est mort en 1903, et c'est son fils ainé , Salomon Arpels (qui se fit appeler Charles a Partir de 1926) qui prit sa suite dans la société, sans aucune formation professionnelle, et fit rentrer ses frères plus tard.




Nous venons de découvrir un Alfred Van Cleef  généreux,


Alfred Van Cleef  années 30

 En revanche, le  donateur de cette lettre ayant eu des scrupules à me confier la deuxième page , je lui laisse l 'entière responsabilité au sujet de Kiki et Nanette, mais si cela s'avérait vrai, cela me réjouirais puisque j ai rendu public le surnom de Kiki 
http://histoiredesvancleefetdesarpels.blogspot.fr/2011/01/estelle-vancleef-de-paris-ne-sest.html
avec son portrait par jacques Nam  vendu en salle de ventes 



et Nanette qui est citée comme ayant aidé la résistance  dans le livre de madame Guidez "Femmes dans la guerre"